LES BUNKERS

Peur d’être démasqué? Voilà comment vaincre le syndrome de l’imposteur.

Ça nous est tous déjà arrivé dans notre vie d’avoir des doutes sur nos compétences. De se dire: “My god, pourquoi est-ce qu’ils m’ont choisi pour ce poste, je n’ai aucune idée de ce que je fais”, ou bien: “C’est la première fois que je fais ce genre de tâche, j’ai tellement peur que tout ce que j’ai appris jusqu’à présent soit de la bullshit et d’échouer lamentablement!”

Ce sont des réactions tout à fait normales quand on est novice dans un domaine et qu’on forge ses premières armes. Nos réalisations, nos réussites, et même nos échecs au fil du temps nous permettent d’être à l’aise avec notre emploi et de prendre la confiance nécessaire pour vaincre le doute qui nous habite quand on débute.

Ou pas...

Si la peur constante de ne pas être à la hauteur te hante encore après 5, 10 ou même 20 ans dans le domaine, on ne parle plus de l’insécurité du débutant. Il s’agit plutôt du syndrome de l’imposteur. En fait, c’est techniquement plutôt un phénomène qu’un syndrome, mais, puisque l’expression a été popularisée ainsi, on va continuer à utiliser le terme “syndrome” dans ce texte.

Il a d’abord été observé par les psychothérapeutes Clance et Imes dans les années 1970. Leurs recherches ont démontré qu’un très grand nombre de femmes ambitieuses et compétentes avaient l’impression d’être des impostrices et de ne pas être assez intelligentes pour mériter les tâches, postes ou avantages qui leur étaient accordés. Elles croyaient que la chance ou d’autres facteurs externes leur avaient permis de connaître leur succès.

Les études réalisées au fil des ans ont mis de l’avant que ce phénomène touche également les hommes, parfois même davantage que les femmes. Clance et Imes suggèrent que l’environnement familial et les stéréotypes des rôles associés aux sexes masculins et féminins dans la société contribuent grandement au développement du phénomène de l’imposteur, ce qui expliquerait en partie les variations dans l’association de ce phénomène à un genre distinct.

Comment le détecter

Le phénomène de l’imposteur se manifeste par ces symptômes:

  • Le sentiment d’être intellectuellement un imposteur;
  • La croyance que son succès est dû à la chance plutôt qu’à ses habiletés;
  • Le manque de confiance en ses capacités à reproduire ses succès passés;
  • La peur du jugement des autres;
  • La peur de l’échec;
  • La peur d’être démasqué;
  • L’incapacité à apprécier ses accomplissements.

C’est un peu comme avoir l’impression que tu es un acteur qui incarne une personne compétente qui a du succès, de faker un rôle qu’en réalité tu ne crois pas pouvoir réellement accomplir.

Ça te semble familier? C’est probable parce qu’on estime qu’environ 70 % des gens ont déjà vécu le phénomène de l’imposteur à un moment ou l’autre de leur vie.

Des répercussions sur ta carrière

Les gens qui vivent ce phénomène sont souvent des high achievers, des gens qui visent haut et qui ont l’habitude d’atteindre d’excellentes performances. Puisqu’ils n’ont jamais l’impression d’être assez compétents pour mériter leur succès, ce sont d’éternels insatisfaits qui visent toujours plus haut et qui se retrouvent pris au piège dans le cercle vicieux du perfectionnisme.

Ils sont aussi convaincus que les autres les perçoivent comme étant meilleurs que ce qu’ils sont réellement et ils vivent donc avec la peur d’être démasqués à tout moment et exposés comme des imposteurs qui ne sont pas à leur place (même si, en réalité, ce sont des professionnels tout à fait compétents et performants qui méritent leur succès et toutes les opportunités qui leur ont été présentées).

Bref, le syndrome de l’imposteur, c’est un frein pour ta carrière. C’est comme si tu te promenais dans une voiture de l’année, une belle Tesla Model S, mais que tu gardais la pédale de frein toujours à moitié enfoncée parce que tu es convaincu qu’en réalité c’est une poubelle bonne pour la scrap et que tu as peur que les autres le réalisent. C’est pourtant une voiture performante qui a fait ses preuves... En lâchant le break et en tenant le gaz au fond, tu pourrais en mettre plein la vue!

Tu passes surement à côté de plusieurs opportunités de peur de ne pas être à la hauteur. Peut-être que tu n’as pas osé aller porter ton c.v. pour un poste qui t’intéresse, que tu n’as pas appliqué pour une promotion, ou que tu as refusé de participer à un événement où tu aurais pu faire valoir tes compétences.

En remettant en question ta légitimité professionnelle, tu te prives d’atteindre ton plein potentiel.

Pour remédier à la situation, il faut d’abord apprendre à reconnaître et accepter le syndrome de l’imposteur, trouver quelqu’un avec qui en parler, ne pas te laisser démoraliser par les gens dans ton environnement de travail, cesser de te comparer aux autres, accepter tes imperfections, arrêter de glorifier les diplômes, apprendre à t’approprier ton succès et te laisser une chance sans te mettre des bâtons dans les roues.

Voyons donc tous ces points en détail.

Prendre conscience du phénomène

La première étape pour empêcher le syndrome de l’imposteur de nuire à ta carrière est de savoir l’identifier.

Chaque fois que te sens envahi par l’anxiété de ne pas pouvoir bien accomplir une tâche qui t’est pourtant familière, que tu te sens mal à l’aise de recevoir des félicitations pour un travail que tu crois qui n’a été bien fait que par chance ou bien qu’une petite voix hautaine te chuchote à l’oreille de ne pas trop te mettre de l’avant parce que d’autres que toi méritent davantage ton poste, prend un peu de recul et shoot toi une bonne dose de réalité.

Demande-toi pourquoi tu te sens de cette façon et ce qui justifierait ces pensées négatives.

Une fois ces raisons identifiées, pose-toi les questions:

-Est-ce que ça change quoi que ce soit à tes compétences et ton expérience? “Non”.
-Est-ce que tu as réalisé des choses dont tu peux être fier et qui prouvent que tu es compétent? “Oui”.

Maintenant, demande-toi si ces pensées ou sentiments t’ont déjà freiné dans ta vie professionnelle. Tu n’arriveras peut-être pas à éliminer complètement ce phénomène de ta vie mais, en le reconnaissant et en identifiant les façons qu’il a de te nuire, tu pourras plus aisément le bloquer et apprendre à mettre la “switch à off”.

Parles-en

Comme bien des problèmes, avoir quelqu’un à qui en parler aide à y voir plus clair. Que ce soit un ami, un mentor ou encore un thérapeute, peu importe; tant qu’il s’agit d’une personne de confiance.

Avoir un autre point de vue sur le sujet te permettra de prendre conscience que le phénomène de l’imposteur est très commun. Peut-être même que la personne avec qui tu vas aborder le sujet subit aussi ce phénomène fréquemment et que vous pourrez avoir des discussions révélatrices à ce sujet!

En partageant son expérience du phénomène de l’imposteur avec quelqu’un d’autre, il devient rapidement moins imposant et ça devient plus facile de ne pas lui accorder autant d’importance et de le laisser nous contrôler.

Ne te laisse pas ton environnement te démoraliser

Malheureusement, il arrive que des collègues ou même le patron y soient pour quelque chose dans l’apparition du phénomène de l’imposteur en nous donnant l’impression de ne pas être à la hauteur. C’est le cas quand:

  • Le patron est un control freak qui ne te laisse pas travailler cinq minutes sans repasser derrière ce que tu fais;
  • Le patron ne prend jamais en considération tes idées et les balaie du revers de la main aussitôt exprimées;
  • Un collègue narcissique prend un malin plaisir à te mettre sous le nez la moindre de tes erreurs pour faire briller davantage ses propres performances;
  • Un collègue qui a le même poste que toi te regarde de haut parce qu’il a plus de diplômes;
  • etc.

Lire aussi: 17 types de mauvais patrons qui gâchent ta job

Malheureusement, ce sont des situations fréquentes qui peuvent être très démotivantes et nous donner l’impression de ne pas être assez compétents pour le poste qu’on occupe.

Prends conscience de la façon dont les gens avec qui tu travailles affectent ta confiance en tes capacités. Ce faisant, tu réaliseras sans doute que tes compétences ne sont pas à blâmer.

Ne te compare pas aux autres

“Quand on se compare aux autres, on est rarement objectif et la comparaison est souvent relative.

On n’essaie pas de trouver nos points forts pour les mettre en comparaison avec les points forts des autres; on compare plutôt ce qu’on admire chez quelqu’un d’autre avec ce qui ne nous satisfait pas de nous-mêmes.
Si tu es introverti, tu te dis: “J’aimerais tellement avoir l’aisance de Johny dans un 5 à 7!”, si tu es lent au clavier tu te dis: “Si seulement j’étais capable de taper autant de mots/minute que Julie!” et pendant ce temps, Johny et Julie envient probablement tes habiletés en informatique et en design visuel.

On se connaît soi-même de l’intérieur (nos pensées, nos doutes, nos peurs), mais on ne connaît les autres que de l’extérieur (l’apparente confiance, la mise de l’avant des qualités).

C’est impossible de ne pas se comparer de façon biaisée, alors ne te compare à personne d'autre qu'à la personne que tu étais hier!

Ne vise pas la perfection

Le syndrome de l’imposteur est souvent amplifié par le perfectionnisme. On a l’impression qu’il faut être parfait dans tous les aspects de notre domaine pour mériter notre succès. Pour vaincre le syndrome de l’imposteur, il faut donc aussi apprendre à contrôler ses tendances perfectionnistes et accepter ses imperfections.

Lire aussi: Bienvenue aux perfectionnistes anonymes  

Au lieu de concentrer ton attention sur la perfection que tu aimerais atteindre, concentre-toi plutôt sur la valeur que tu crées par ton travail.
Même si tu ne sais pas tout et que tu n’es pas parfait, la perfection n’est pas un prérequis pour pouvoir partager tes connaissances. Tu en connais probablement beaucoup plus que bien des gens dans ton domaine et ce que tu peux leur apporter a une grande valeur.

Tu n’as pas à tout maîtriser pour mériter ton succès. Je ne dis pas que tu doives te complaire dans la médiocrité, mais descends la barre que tu vises pour qu’elle soit au moins humainement atteignable.

Nous sommes tous des imposteurs!

Si, selon toi, pour ne pas être un imposteur il faut être parfait et tout connaître dans son domaine, alors dis-toi que nous sommes tous des imposteurs. Personne n’est parfait dans son travail et, plus souvent qu'autrement, les gens savent à moitié ce qu'ils font et apprennent le reste "sur le tas"!

Alors, prends un moment de recul quand tu te mets à obséder sur des détails et demande-toi à partir de quel moment ce que tu fais est suffisant pour atteindre les objectifs, sans être parfait.

Ne te laisse pas intimider par les diplômes

Ne surestime pas les diplômes. En fin de compte, ça te donne un beau bout de papier à encadrer. Ça dit au monde que tu as versé des milliers de dollars à une institution pour avoir des connaissances dans un domaine et que tu as assisté à assez de cours pour avoir la note de passage. Ni plus, ni moins.

Alors, ne sois pas intimidé par quelqu'un qui a plus de diplômes que toi, ce n'est pas forcément un gage de compétence.

Ça veut seulement dire que la personne a une longueur d’avance sur les bases d’un domaine précis (et quelques sujets complètement inutiles au poste qu’elle occupe). Mais dans la réalité du marché, avec toutes les ressources à notre disposition de nos jours, les chances sont qu'une personne autodidacte qui sait où chercher de l'information pertinente va être plus compétente qu'un diplômé qui a la curiosité intellectuelle d'une roche.

Approprie-toi ton succès

Tu ne t'es pas rendu où tu es simplement par chance, ni à cause de tes beaux yeux, ni même à cause de ton réseau de contacts. Ce sont tous des facteurs qui peuvent influencer un parcours professionnel mais, si tu étais un plouc sans talent, tu n’aurais pas pu réaliser les accomplissements qui t’ont permis de te rendre où tu es présentement.

Ne te concentre pas sur ce que tu ne peux pas faire ou n’as pas encore fait, concentre toi plutôt sur la valeur que tu as pu apporter dans ton emploi au fil du temps.Un geste concret que tu peux poser pour t’aider à t’approprier ton succès est de dresser une liste (ça peut être dans un petit carnet ou un fichier à l’ordinateur) de tes bons coups des dernières années et de la tenir à jour avec les succès que tu connais au fil du temps. Tu peux conserver dans cette liste de “wins” les commentaires de clients satisfaits, les statistiques de vente, la production que tu as réussi à atteindre, bref, tout ce qui te prouve que tu fais du bon travail.

Dans les moments de doute où le syndrome de l’imposteur s’invite dans ton esprit, ouvre ton fichier ou ton carnet pour te rappeler que tu es à ta place et que tu l’as bien méritée.

On nous apprend dans la vie qu’il faut assumer la responsabilité de nos échecs; il en va de même pour nos succès!

Laisse-toi une chance

Même si tu as l’impression de ne pas être à la hauteur de ton travail, ce n’est pas à toi d’en décider, c’est à ton employeur.

Alors, que ce soit pour décrocher une promotion ou obtenir un nouvel emploi, ose viser haut et laisse tes accomplissements et ton travail parler d’eux-mêmes. Ne te mets pas des bâtons dans les roues en ne tentant pas ta chance parce que tu ne crois pas être à la hauteur.

Ne te prive pas d’atteindre ton plein potentiel et ne prive pas le monde de tes talents!

Conclusion

Le syndrome de l’imposteur peut mettre un frein sur ta carrière si tu le laisses te contrôler. Pour l’empêcher de nuire, il faut d’abord prendre conscience du phénomène, en identifier les causes et les façons dont ça te nuit au travail.

Parler de ton expérience avec le syndrome de l’imposteur avec une personne de confiance, soit un ami, un mentor ou même un thérapeute, peut être très bénéfique pour mettre les choses en perspective et réaliser que tu n’es pas seul à vivre ce phénomène.
Ensuite, c’est important de prendre conscience de la façon dont ton environnement de travail, tes collègues ou ton patron, affectent ta confiance en tes capacités. C’est possible que ce soit un élément déclencheur pour le phénomène de l’imposteur et que tes compétences ne soient pas à blâmer.

Tu dois aussi cesser de te comparer aux autres. C’est impossible de ne pas se comparer de façon biaisée puisqu’on ne connaît réellement les autres que selon ce qu’ils laissent paraître. Alors, ne te compare à personne d’autre qu’à toi-même.

Les tendances perfectionnistes ont aussi souvent un rôle de premier plan à jouer dans le phénomène de l’imposteur. On a trop souvent l’impression qu’il faut maîtriser son domaine avant que notre travail ait une réelle valeur. Ce n’est pas le cas, car personne n’est absolument parfait dans son travail et les gens apprennent souvent “sur le tas” en tirant profit de leurs erreurs.

Une trop grande importance accordée aux diplômes des autres par rapport aux siens peut aussi déclencher ce phénomène. Il ne faut pas perdre de vue qu’une personne autodidacte qui sait comment bien faire ses recherches est souvent plus compétente qu’une personne surdiplômée, mais sans curiosité intellectuelle.  

Pour apprendre à t’approprier tes succès, tu peux dresser une liste de tes bons coups passés que tu peux mettre à jour au fil du temps. Dans les moments de doute, cette liste peut devenir un outil pour te rappeler que tu es compétent et mérite ton succès.

Finalement, ne te prive pas d’opportunités de peur de ne pas être à la hauteur. Ce n’est pas à toi d’en juger, mais à ton employeur. Si tu veux qu’il te donne ta chance, tu dois d’abord t’en laisser une.

Le bon côté

Le syndrome de l’imposteur est un phénomène normal que la plupart des gens ont ressenti ou ressentiront au cours de leur vie.

Si quelqu’un te répond qu’il n’a jamais ressenti ça, malheureusement pour cette personne c’est peut-être parce qu’elle atteinte de l’inverse du syndrome de l’imposteur: l’effet Dunning-Kruger, qui est la tendance de certaines personnes trop confiantes à se considérer beaucoup plus compétentes qu’elles ne le sont en réalité.

Alors, ne t’en fais pas, le bon côté du syndrome de l’imposteur est que ceux qui en souffrent et qui ont peur de ne pas être assez compétents sont généralement ceux qui le sont réellement!

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