Pour ĂȘtre capable dâaccomplir quoi que ce soit, il faut prendre les choses en main, sortir de la routine, agir. Et non seulement ça, mais il faut Ă©galement convaincre les autres de nous suivre dans notre mission de rendre le monde (ou du moins, notre entreprise) un peu meilleur.
Ce nâest pas une mince affaire, les gens sont incroyablement tĂȘtus et rĂ©sistants au changement. Il faut donc (autant que possible) que ça vienne dâeux et quâils co-crĂ©ent le projet avec toi.
Peu importe ta position, seul, tu nâas aucun poids. MĂȘme le PDG dâune entreprise ne peut forcer sa compagnie Ă prendre un virage quâelle ne veut pas prendre.
Lorsque jâai parlĂ© de la qualitĂ© dâune idĂ©e (dans la premiĂšre partie du livre), je tâai dit que tu ferais mieux de prendre les idĂ©es des autres personnes plus Ă©levĂ©es dans la hiĂ©rarchie de ton entreprise si tu veux quâelles finissent par voir le jour. Câest maintenant le temps dâapprendre comment trouver ces idĂ©es et impliquer la personne dans leur dĂ©veloppement.
Pour ce faire, je vais te proposer une stratĂ©gie qui sâinspire des deux modĂšles qui ont, chacun leur tour, rĂ©volutionnĂ© la façon de crĂ©er et de dĂ©velopper des entreprises rentables.La premiĂšre est la mĂ©thode SPIN, un framework de vente rĂ©alisĂ© par Neil Rackham, le fondateur de la multinationale Huthwaite, une des plus prestigieuses agences de coaching et dâentraĂźnement en vente, nĂ©gociation et communication. Cette mĂ©thode est issue de lâanalyse de lâimpact de 116 facteurs sur 35 000 transactions rĂ©coltĂ©es et dĂ©cortiquĂ©es sur plus de 10 ans. Elle a redĂ©fini la façon de vendre et de nĂ©gocier au sein des plus grosses entreprises Ă travers le monde.
Ensuite, nous allons utiliser la mĂ©thode LEAN telle qu'adaptĂ©e par Eric Ries pour mettre sur pied et concrĂ©tiser le projet. Cette mĂ©thode a complĂštement transformĂ© Silicon Valley, la capitale mondiale de lâinnovation, et est au coeur de lâADN des entreprises comme Google, Tesla et Amazon.
Ensemble, ces deux stratĂ©gies nous offrent un chemin clair pour devenir un intrapreneur (quelquâun qui dĂ©veloppe une entreprise au sein dâune entreprise) ou un entrepreneur, prendre le contrĂŽle de sa destinĂ©e et vivre la vie dont on a toujours rĂȘvĂ©.
La mĂ©thode SPIN a Ă©tĂ© dĂ©veloppĂ©e pour aider les gens Ă vendre leur produit ou service au sein dâun contexte corporatif (vente B2B). Je te recommande fortement dâaller lire lâouvrage original qui est rempli dâexemples concrets et dâexercices Ă complĂ©ter pour drastiquement amĂ©liorer tes talents de vendeur.
Lâangle est Ă©galement trĂšs diffĂ©rent de ce que je vais te proposer puisque jâadapte la stratĂ©gie Ă un autre contexte, soit la persuasion et le leadership au sein dâune entreprise.
SPIN est un acronyme pour dĂ©crire les quatre Ă©tapes du processus de vente: Situation, ProblĂšme, Implications et Need-Payoff (il sâagit dâune mĂ©thode anglophone, la derniĂšre lettre se traduit trĂšs mal). Chacune de ces Ă©tapes te demande de poser certaines questions Ă la personne que tu souhaites persuader. Ce qui est important nâest pas le type (question ouverte ou fermĂ©e), mais bien lâobjectif derriĂšre ces questions.
La situation reprĂ©sente le point de dĂ©part. Tu nâas aucune idĂ©e de ce que tu pourrais bien faire, alors tu dois faire tes recherches pour connaĂźtre lâĂ©tat rĂ©el des choses. Quel est lâobjectif de lâentreprise et comment rĂ©ussit-elle Ă lâaccomplir? Comment fait-elle son argent? Quels outils, processus ou logiciels sont utilisĂ©s dans la crĂ©ation de ce bien/service?
Est-ce que la compagnie possÚde un organigramme? Qui est responsable de prendre les décisions? Comment sont structurés les départements? Existe-t-il un guide qui détaille les procédures de travail des employés?
Ton objectif est, dans un premier temps, non seulement de comprendre le fonctionnement global de lâentreprise, mais Ă©galement de bien connaĂźtre les rouages qui lui permettent de fonctionner.
AprĂšs avoir Ă©tĂ© attentif et tâĂȘtre renseignĂ© correctement sur lâentreprise, il faut trouver le temps de tâasseoir avec un gestionnaire, lui poser les bonnes questions et Ă©couter attentivement...
Une business a pour objectif de gĂ©nĂ©rer des profits Ă travers la satisfaction dâun dĂ©sir par un produit ou service. Entre la crĂ©ation de ce produit/service et sa livraison se cache une multitude dâĂ©tapes qui ralentissent le processus et augmentent les coĂ»ts.
Voici quelques exemples de questions à poser pour trouver les différentes frustrations et inefficacités:
Ce nâest pas le chialage qui manque dans une compagnie. Que ce soit le dĂ©partement du service Ă la clientĂšle, des ventes, des technologies ou du marketing, tout le monde possĂšde son lot dâinsatisfactions.
Tu dois faire attention pour ne pas te prĂ©senter en disant âla compagnie est brisĂ©eâ, on nâest pas lĂ pour parler en mal de personne. Lâobjectif est plutĂŽt de faire lâinventaire de TOUS les problĂšmes quâon pourrait potentiellement rĂ©gler pour une entreprise.
Et ce nâest pas parce que Nicole des ressources humaines a chialĂ© sur quelque chose quâil sâagit vĂ©ritablement dâun problĂšme. Chaque point soulevĂ© Ă cette Ă©tape est une hypothĂšse quâon doit par la suite valider.
Câest un peu comme lorsquâon gĂšre un site web. Il va TOUJOURS y avoir des bogues. DĂšs que le site ou lâapplication est le moindrement complexe, câest quasi impossible de tous les rĂ©gler. Câest pourquoi, une fois quâon a trouvĂ© un problĂšme, on doit se poser trois questions:
Ce nâest que si le coĂ»t de la premiĂšre question est infĂ©rieur Ă la somme des deux derniĂšres quâon doit considĂ©rer dĂ©ployer des ressources pour le rĂ©gler. Et lorsquâon travaille au sein dâune Ă©quipe rĂ©duite, ce qui est presque toujours le cas, alors il y a Ă©galement le coĂ»t dâopportunitĂ© Ă prendre en compte.
Chaque heure que tu mets Ă rĂ©gler un problĂšme mineur est une heure que tu nâinvestis pas Ă rĂ©gler un problĂšme majeur. MĂȘme si ton temps est rentable, il pourrait lâĂȘtre encore plus.
Il faut donc inventorier les problĂšmes, les classer du plus important au plus insignifiant et prioriser. Mais pour faire ça, encore faut-il quâon ait les outils pour quantifier et mesurer les problĂšmes en question! Plus on va vite, plus conduire les yeux fermĂ©s devient un problĂšme.
Câest pourquoi tant dâentrepreneurs nâont jamais portĂ© attention Ă lâintelligence dâaffaires. Ils grossissent tranquillement leur entreprise les yeux fermĂ©s pour ensuite se rĂ©veiller, sept ans plus tard, avec un Ă©norme navire en haute mer et nâont aucune idĂ©e dâoĂč ils sont.
Le manque de donnĂ©es est souvent un problĂšme Ă part entiĂšre auquel tu peux tâattarder. Quelles sont les mĂ©triques de performance clĂ© (KPI, pour Key Performance Indicator dans le lingo de la business!) de lâentreprise et comment peut-on calculer lâinfluence dâun facteur sur ces mĂ©triques?
JâĂ©viterais de mâavancer sur un terrain oĂč câest difficile dâavoir des statistiques. Sâil nây a aucune façon dâĂ©valuer objectivement lâefficacitĂ© dâun projet, tes efforts sont exposĂ©s au jugement subjectif des preneurs de dĂ©cisions. Ăa veut dire que si ton supĂ©rieur immĂ©diat nâaime pas ce que tu fais (pour nâimporte quelle raison niaiseuse), il peut tirer la plug sur ton projet.
Avoir des rĂ©sultats mesurables te permet de garder le cap (et ton emploi) si jamais (quand) quelquâun dĂ©cide dâattaquer ton projet.
Non seulement ça, mais si tu ne peux pas le mesurer, alors tu ne peux pas en parler! Disons que tu veuilles parler de tes accomplissements sur ton profil LinkedIn, laquelle de ces deux phrases est la plus convaincante?
âJâai entrepris et encadrĂ© la mise en place dâun systĂšme de gestion dâinventaire pour la compagnie X.â
OU
âJâai entrepris et encadrĂ© la mise en place dâun systĂšme de gestion dâinventaire qui a aidĂ© la compagnie X Ă rĂ©duire ses dĂ©penses de 150 000 $ par an sans impact nĂ©gatif sur la satisfaction client.â
Personne nâengage un titre. DĂ©cris-toi plutĂŽt en fonction de ta capacitĂ© Ă rĂ©duire les dĂ©penses et augmenter les revenus.
Bref, tout ça pour dire quâun bon problĂšme est donc un problĂšme que tu peux quantifier.
Jâinsiste sur ce point parce que ce conseil mâa sauvĂ© les fesses Ă plusieurs reprises lors de mon passage chez Voyages Ă Rabais.
Ils mâavaient engagĂ© principalement pour que je mâoccupe du SEM et des mĂ©dias sociaux, donc tout ce qui a trait Ă Facebook et Google.
En arrivant dans lâentreprise, je me suis rendu compte quâils envoyaient leur infolettre Ă lâaide dâun systĂšme maison qui nâoffrait aucune possibilitĂ© de connaĂźtre le retour sur investissement de leur stratĂ©gie.
En utilisant la formule SPIN, jâai convaincu le VP de passer Ă Mailchimp (une plateforme plus complĂšte) pour avoir accĂšs au pourcentage de personnes qui ouvrent ou cliquent dans les infolettres que lâentreprise envoyait. Ăa nâaura pas Ă©tĂ© simple puisque cette plateforme leur coĂ»te plus de 10 000 $ par annĂ©e. Le prix Ă©levĂ© provient de la quantitĂ© phĂ©nomĂ©nale dâabonnĂ©s Ă leur infolettre (plus de 500 000).
Une fois sur Mailchimp, jâai pu faire des tests A/B, câest-Ă -dire quâon change une variable et on regarde son influence sur le taux de clic, tout ça dans lâespoir dâimplĂ©menter une stratĂ©gie de marketing par courriel que je croyais ĂȘtre plus efficace.
Au lieu dâenvoyer une grosse image de plage avec un prix, je voulais envoyer des courriels qui enseignent des choses pratiques aux gens tout en Ă©tant amusants Ă lire. Je croyais aussi quâun ton personnel Ă©tait de mise et que les infolettres devaient ĂȘtre signĂ©es. Je voulais aussi rĂ©duire le nombre dâimages dans les infolettres puisque presque toutes les Ă©tudes sur le sujet dĂ©montrent quâelles nuisent Ă leur efficacitĂ©.
CâĂ©tait Ă lâĂ©poque oĂč les mĂ©dias sociaux venaient tout juste de commencer Ă prendre de lâampleur. Plus personne ne croyait au email marketing. Les courriels, disait mon VP, ça marchait en 2004.
Jâai eu un âOKâ pour tester la stratĂ©gie sur un Ă©chantillon (50 000 personnes). La prĂ©sidente (Sylvie Myres) nâavait pas approuvĂ© directement et on savait tous quâelle ne serait pas chaude Ă lâidĂ©e. Le mot dâordre Ă lâĂ©poque Ă©tait dâĂȘtre le plus professionnel et âcorporateâ possible. âAvec un nom comme Voyages Ă Rabais, on ne peut pas se permettre de faire des blagues dans notre marketing.â
Les résultats?
La nouvelle infolettre a battu lâancienne Ă plate couture avec un taux de clic trois fois plus Ă©levĂ©. Non seulement ça, mais avant, câĂ©tait difficile de savoir si lâinfolettre avait un impact rĂ©el sur les ventes. AussitĂŽt le courriel envoyĂ©, le tĂ©lĂ©phone sâest mis Ă sonner. Les conseillĂšres nây comprenaient rien⊠Les gens demandaient Ă parler Ă Olivier Lambert!
Un an plus tard, lâentreprise avait fait un virage Ă 180 degrĂ©s sur sa stratĂ©gie de marketing par courriel, ce qui aura Ă©tĂ© lâune de ses manoeuvres les plus profitables.
Le vice-prĂ©sident, David GrĂ©goire, a parlĂ© des stratĂ©gies quâon a mises en place Ă dâautres dirigeants dâentreprises et lors de plusieurs confĂ©rences, toujours en mentionnant mon nom. Lorsque je lui ai demandĂ©, il mâa Ă©galement fait une recommandation LinkedIn trĂšs favorable, ce qui aide Ă©normĂ©ment pour Ă©tablir sa crĂ©dibilitĂ© (plus sur ça dans le prochain chapitre).
Malheureusement, mĂȘme avec les chiffres Ă lâappui, ce nâest parfois pas suffisant pour avoir une influence durable sur une entreprise. Peu aprĂšs mon dĂ©part, David est Ă©galement parti pour fonder sa propre entreprise. Depuis, on a dĂ» voir toutes les innovations quâon avait mises sur pied ensemble se faire effacer une Ă une. Je ne mây attendais pas et ça aura Ă©tĂ© excessivement difficile de regarder quelque chose qui me rend fier sâeffacer sans rien pouvoir faire.
Tout ça mâaura appris quelques leçons importantes, dont celle-ci: la culture dâune entreprise lui provient de la somme des croyances et attitudes de ses employĂ©s. Les changements ne sont pas restĂ©s parce que je nâai rĂ©ussi Ă influencer quâun seul individu. Suite Ă notre dĂ©part, plus personne ne croyait Ă nos stratĂ©gies. Les chiffres, sans personne pour les transformer en arguments, ne sont que des taches noires sur un Ă©cran.
Une fois que tu as trouvĂ© un problĂšme que tu peux rĂ©gler et qui va avoir un impact mesurable sur lâaugmentation des revenus ou la rĂ©duction des dĂ©penses, câest primordial dâavoir le support de personnes clĂ©s. Sans David, mĂȘme avec les chiffres pour supporter mes stratĂ©gies, je me serais sans doute fait congĂ©dier. On ne peut agir seul contre une entreprise â mĂȘme si on a raison. On ne peut pas forcer quelquâun Ă changer, il faut que ce soit volontaire, il faut influencer les preneurs de dĂ©cisions.
Pour ĂȘtre capable de convaincre ces personnes, on commence par leur faire reconnaĂźtre le problĂšme, pour ensuite effectuer les deux derniĂšres Ă©tapes de la mĂ©thode SPIN...
DĂšs quâon trouve un problĂšme intĂ©ressant, notre premier rĂ©flexe est de se pencher immĂ©diatement sur sa solution â câest une grave erreur. DĂšs quâon termine la discussion sur le problĂšme pour dĂ©buter celle sur la solution, on va se mettre Ă rencontrer des obstacles et objections qui expliquent pourquoi on ne peut pas (ou ne devrait pas) faire quelque chose.
Offrir une solution à cette étape tue ton projet dans son berceau. Tu te souviens de nos trois questions?
SI (Coût de la solution < (Coût du problÚme + Bénéfices de la solution)) ALORS le projet est potentiellement viable.
Le coĂ»t de la solution nâa pas encore Ă©tĂ© dĂ©terminĂ© (on va voir comment sâassurer de le minimiser avec la mĂ©thode Lean), mais avant dâen parler, il faut sâassurer que le cĂŽtĂ© droit de lâĂ©quation soit aussi lourd que possible pour que la solution paraisse acceptable, voire mĂȘme dĂ©sirable. Câest lĂ que les deux derniĂšres questions de la mĂ©thode SPIN entrent en jeu. Les questions dâimplications visent Ă faire prendre conscience Ă lâautre du coĂ»t rĂ©el du problĂšme et les questions need-payoff visent Ă rendre les bĂ©nĂ©fices de la solution plus tangibles.
Ces questions sont vitales parce que les problĂšmes importants se cachent souvent en pleine vue de lâentreprise. Les choses ont toujours Ă©tĂ© faites dâune certaine façon et ça nâa jamais posĂ© de problĂšme⊠Jusquâau jour oĂč lâentreprise est devenue trop grosse pour que ça reste viable. Mais puisque âon a toujours fait ça comme çaâ, personne ne prend le temps de trouver une meilleure façon de faire.
Ă cause de ça, les problĂšmes importants ne sont souvent mĂȘme pas considĂ©rĂ©s comme des problĂšmes. Câest juste quelque chose quâon a toujours fait et qui ne semble pas causer de danger imminent.
Voici un exemple:
TrĂšs peu dâentreprises utilisent un systĂšme de boĂźte courriel collaborative. Si câest le cas pour ton entreprise, câest dĂ©finitivement un quick win facile Ă implĂ©menter.
Disons que lâentreprise reçoit un bon volume de messages courriel. Pour y rĂ©pondre, elle a une boĂźte gĂ©nĂ©rale et chaque employĂ© possĂšde une boĂźte privĂ©e pour les communications internes. Ă premiĂšre vue, pas de problĂšmeâŠ
Mais quâarrive-t-il lorsque quelquâun fait une erreur? Est-ce quâon peut savoir qui a envoyĂ© le courriel en question? Et est-ce que ça arrive quâon doive ĂȘtre plusieurs sur la mĂȘme boĂźte de courriel en mĂȘme temps? Comment est-ce que les cas sont distribuĂ©s? Comment savoir qui doit effectuer le suivi? Est-ce possible dâajouter des notes Ă un courriel pour que les autres employĂ©s le voient? Est-ce que ça arrive que deux employĂ©s rĂ©pondent Ă la mĂȘme personne en mĂȘme temps?
Câest en posant ce genre de question que le gestionnaire va finir par se dire âOuain, on a peut-ĂȘtre un petit problĂšme finalementâ. Mais ce nâest pas parce quâil verbalise le problĂšme quâil rĂ©alise Ă quel point gĂ©rer ses courriels de cette façon est stupide. On enchaĂźne donc avec des questions dâimplicationsâŠ
Quels sont les dĂ©lais de rĂ©ponse? Est-ce que ça arrive quâon perde un prospect parce que ça aura Ă©tĂ© trop long lui rĂ©pondre, ou pire, quâon ne lui ait jamais rĂ©pondu? Est-ce que ça pourrait avoir un impact sur la crĂ©dibilitĂ© de lâentreprise? Est-ce quâon a dĂ©jĂ envoyĂ© un courriel avec de fausses informations Ă cause dâun manque de communication? Et Ă lâinterne, est-ce que les employĂ©s aiment gĂ©rer les courriels? Est-ce quâils ont lâimpression dâĂȘtre submergĂ©s par le nombre de courriels quâils reçoivent? Quel impact est-ce que ça a sur leur humeur et leur productivitĂ©? Est-ce quâils se plaignent parfois? Quelles consĂ©quences est-ce que les imperfections de ce systĂšme entraĂźnent?
En dâautres mots, comment est-ce que le problĂšme affecte directement (ou indirectement) les KPI de lâentreprise? Plus on pose ce genre de question, plus la personne est forcĂ©e dâadmettre que le problĂšme est important.
Ăa ne veut pas nĂ©cessairement dire que la personne va ĂȘtre convaincue de la nĂ©cessitĂ© de changer. MĂȘme si la solution est simple et gratuite, elle comporte tout de mĂȘme un coĂ»t (lâĂ©lĂ©ment Ă gauche de notre Ă©quation). Par exemple, la solution au problĂšme des courriels ne coĂ»te presque rien. Par contre, la gestion des emails Ă©tant une activitĂ© au coeur du roulement de lâentreprise, une transition implique que TOUS les employĂ©s vont devoir sây adapter. On parle dâune pĂ©riode de transition importante dans laquelle plusieurs choses peuvent mal se passer.
Pour convaincre quelquâun dâagir, il faut vraiment prendre le temps de bien dĂ©finir les implications. Non seulement ça, mais aussi quels seraient les avantages Ă trouver une solution...
Alors que les questions dâimplications se concentrent sur le nĂ©gatif, les questions need-payoff se concentrent sur le positif. On demande des choses comme:
Ce type de question permet dâaccomplir deux choses:
Tu aimerais simplifier la prise de rendez-vous lors de consultations? Pourquoi est-ce que câest important pour toi? Est-ce que tu aimerais un systĂšme qui sâoccupe de faire les suivis automatiquement? Quels autres problĂšmes est-ce que ça rĂšglerait? Crois-tu que ça va rĂ©duire les annulations de derniĂšre minute? Quel impact crois-tu que ce systĂšme aurait chez ta clientĂšle? Combien dâargent penses-tu sauver avec un tel systĂšme?
Lorsquâun prospect fait lâinventaire des bĂ©nĂ©fices lui-mĂȘme, alors ses objections (comme le prix ou un dĂ©faut dans le service ou produit offert) semblent plus acceptables.
Ce genre de question possĂšde Ă©galement un deuxiĂšme effet important: ça entraĂźne lâautre personne Ă vendre la solution. Câest trĂšs rare quâon sâadresse directement au preneur de dĂ©cision. Habituellement, on passe par un intermĂ©diaire qui doit faire approuver le projet ou la dĂ©pense par quelquâun au-dessus de lui. MĂȘme le PDG doit rĂ©pondre Ă un conseil dâadministration!
Ăa veut dire que la personne avec qui tu parles de ce projet va devoir se tourner de bord et parler de ta solution Ă ses supĂ©rieurs. Si tu lui fais dire lui-mĂȘme les bĂ©nĂ©fices et avantages et quâil âachĂšteâ mentalement lâidĂ©e, il va vraiment sâimpliquer personnellement dans la mise en oeuvre du projet.
Puisque ça sâadresse Ă des vendeurs, la mĂ©thode SPIN requiert que tu possĂšdes dĂ©jĂ la solution au problĂšme. Je dois donc introduire une nouvelle Ă©tape: lâextraction dâidĂ©e.
Il sâagit dâun concept dĂ©veloppĂ© par Dane Maxwell, un entrepreneur qui se spĂ©cialise dans la crĂ©ation de startups en technologie. Son processus, issu du mariage de la mĂ©thode SPIN et de lâapproche LEAN, le rend complĂštement original dans sa façon dâaider les entreprises et de rĂ©gler leurs problĂšmes.
Il a donnĂ© un exemple trĂšs concret du processus en publiant un appel de 45 minutes oĂč il discute avec la compagnie qui ouvre sa piscine. Dans cet appel, Dane extrait deux idĂ©es dâentreprises quâil pourrait crĂ©er. Lâentrepreneur lui dit trĂšs clairement quâil serait prĂȘt Ă payer 500 $ par mois pour une des deux solutions et lui assure que câest Ă©galement quelque chose qui intĂ©resserait tous ses compĂ©titeurs.
Sa façon de faire est tout simplement brillante. AprĂšs avoir questionnĂ© lâentrepreneur sur la logistique de son entreprise (questions Situationnelles), il rĂ©ussit Ă trouver deux frustrations majeures (en utilisant les questions de ProblĂšmes): la logistique de paiement et la prise de rendez-vous sont excessivement complexes et lourdes et certains clients se plaignent que le nombre dâheures facturĂ©es est trop Ă©levĂ©.
AprĂšs avoir trouvĂ© les deux problĂšmes, il demande Ă lâentrepreneur lequel des deux semble le plus important Ă ses yeux (le deuxiĂšme).
Il enchaĂźne donc avec des questions dâimplication et need-payoff pour dĂ©velopper le besoin et les bienfaits:
Les questions que je viens dâĂ©numĂ©rer sont transcrites et traduites directement Ă partir de lâappel tĂ©lĂ©phonique quâil a eu avec lâentrepreneur. Si tu parles anglais, je te recommande FORTEMENT de prendre le temps de bien Ă©couter et de prendre des notes. Cette conversation est lâexemple parfait de la mĂ©thode SPIN que tu vas pouvoir mettre en place pour convaincre une entreprise de financer un projet, que ce soit sous lâangle dâintrapreneur ou dâentrepreneur.
Dans les questions ci-dessus, jâai mis un segment en italique. Cette question nâest pas dans le modĂšle SPIN et concerne le âquoiâ. Si tu avais une baguette magique, quâest-ce qui se passerait? Quel serait le scĂ©nario idĂ©al?
Lorsquâon trouve un problĂšme, il faut Ă©galement trouver une solution. Mais la plupart du temps, les gens la connaissent dĂ©jĂ . Ils peuvent te dire le âquoiâ. Ce qui leur manque, câest le âcommentâ. Câest lĂ que tu entres en jeu.
Si tu es capable de faire dire Ă la personne exactement ce quâelle veut et combien ça vaut pour elle, câest certain que tu vas avoir son support pour le mettre en place une fois que tu vas avoir trouvĂ© le âcommentâ.
Ăa se peut que la personne ne trouve pas elle-mĂȘme la solution. Dans ce cas, essaie de la guider en lui posant des questions qui mĂšnent vers ta solution (si tu en as une). Autant que possible, il faut que ça vienne dâelle. Tourne ta langue sept fois avant de lui proposer ouvertement une idĂ©e. Sois patient, laisse lui prendre le contrĂŽle de la conversation.
Lorsquâon est en mode rĂ©solution de problĂšme, ce nâest pas rare de rĂȘver en couleurs et de croire quâon va changer le monde et devenir millionnaire. Câest lâeffet de la dopamine qui fait son chemin Ă travers tes synapses.
Tu connais un entrepreneur qui lance 1 000 projets sans jamais prendre la peine dâen terminer un? Maintenant tu comprends pourquoi.
Lâantidote se trouve dans un concept de la mĂ©thode Lean: le MVP.
MVP rĂ©fĂšre Ă Minimum Viable Product (produit minimum viable en français). Il sâagit de se poser la question: quelle serait la solution la plus simple, abordable, facile et rapide Ă mettre en place pour rĂ©gler ce problĂšme (ou tester une hypothĂšse dâaffaires).
Dans le cas de notre exemple avec les courriels, la solution est dĂ©jĂ simple. Un compte sur ZenDesk Inbox qui est gratuit (quâon utilise et aime beaucoup) ou un compte sur Intercom.io qui est payant, mais incroyablement complet.
Cependant, câest possible que la solution soit excessivement complexe, comme changer de systĂšme de gestion pour son site web, son systĂšme de caisse ou encore son CRM de vente.
Dans lâexemple avec Dane, il fallait crĂ©er une application mobile.
Mais mĂȘme lorsque câest complexe, il y a souvent moyen de faire simple⊠Voici un exemple de mon temps chez Voyages Ă Rabais.
Ăa arrivait Ă lâoccasion dâavoir des temps morts Ă certaines heures de la journĂ©e. Une vingtaine de conseillers qui se tournent les pouces, ça coĂ»te cher!
Pour rĂ©gler la solution, David a proposĂ© quâon demande aux gens sur le site web de nous dire briĂšvement le genre de voyage quâils veulent pour quâun agent effectue la recherche pour eux et les recontacte par tĂ©lĂ©phone avec la meilleure offre.
La solution traditionnelle Ă©tait longue et coĂ»teuse. Ăa impliquait de crĂ©er le formulaire sur le site web, mais Ă©galement un systĂšme pour rĂ©partir les prospects entre les conseillers ainsi quâune façon rapide de mettre la fonctionnalitĂ© Ă on ou off.
Traditionnellement, on aurait dĂ» 1) demander au designer de faire le visuel Ă intĂ©grer sur le site web, 2) faire approuver les maquettes pour ensuite 3) demander Ă lâintĂ©grateur de transformer la maquette en code HTML et CSS pour finalement 4) passer la puck au programmeur pour quâil intĂšgre la solution au systĂšme et 5) attendre le prochain dĂ©ploiement du code.
Ce processus peut facilement prendre plusieurs mois, ou pire, ne jamais ĂȘtre complĂ©tĂ©.
Le coût associé à cette solution est considérable.
Pour contourner le problĂšme, on a dĂ©cidĂ© dâutiliser Optimizely et Google Sheets. Le premier est un logiciel de test A/B pour site web. Ăa permet de modifier un Ă©lĂ©ment sur une page, de montrer la variation Ă un pourcentage fixe des visiteurs et de regarder lâimpact sur les ventes.
Câest super pratique, parce que ça nous a permis de montrer le formulaire Ă seulement 10 % des visiteurs, Ă©vitant ainsi dâen avoir trop en mĂȘme temps. Câest aussi trĂšs simple de mettre un test en marche ou de lâarrĂȘter, ce qui nous permettait de sâen servir uniquement lorsquâon en avait besoin.
Jâai créé un formulaire Ă lâaide dâun logiciel en ligne que jâai ensuite liĂ© Ă un chiffrier Google Ă lâaide dâun petit script que jâai trouvĂ© sur Internet. Les rĂ©ponses s'enregistraient donc dans un genre de feuille Excel Ă laquelle tous les conseillers pouvaient accĂ©der en mĂȘme temps. Lorsquâun conseiller avait du temps libre, il soulignait la rangĂ©e contenant la recherche quâil allait effectuer et ajoutait son nom Ă la fin.
LâidĂ©e a Ă©tĂ© lancĂ©e lundi midi et mardi matin la solution Ă©tait opĂ©rationnelle.
Ăa, câest lâesprit derriĂšre la mĂ©thode Lean: comment tester et implĂ©menter des idĂ©es et solutions le plus rapidement possible au coĂ»t le plus faible possible.
Si (et seulement si) on se rend compte que ça vaut vraiment la peine dâinvestir pour une solution plus permanente et mieux faite, au moins on prend cette dĂ©cision en se basant sur quelque chose de concret et non sur le guts dâun gestionnaire.
Les exemples que jâai donnĂ©s concernent la technologie parce que je travaille dans ce domaine, mais les principes derriĂšre la mĂ©thode Lean sâappliquent Ă toutes les industries.
Pour créer de la valeur, il faut faire bouger les choses. Et pour faire bouger les choses, on doit pouvoir persuader les gens que le changement est nécessaire.
On ne convainc pas quelquâun en parlant, mais en lâĂ©coutant. La persuasion est Ă propos de lâautre. La meilleure façon de dĂ©velopper son leadership est dâapprendre Ă poser de meilleures questions.
En devenant une personne plus persuasive, ça va te donner le pouvoir de mettre sur pied des projets qui vont apporter des solutions et rĂ©sultats quantifiables en ayant comme objectif dâaugmenter les revenus ou de rĂ©duire les dĂ©penses.
En crĂ©ant ce genre de projet, ça va te permettre de te crĂ©er un âportfolioâ virtuel dans le but dâĂ©tablir ta crĂ©dibilitĂ©, dâaugmenter ton influence et de nĂ©gocier une meilleure compensation.